SIONGRIE 2008

BIG trip - Daniel Gobert - jour 4

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Samedi 16 août 2008

La Suisse solitaire

Alors que le soleil semble revenu sur la vallée du Rhône et le Valais, je me dois dès après le déjeûner en compagnie de Jules, aller dire au revoir aux autres en camping. Je sais que François Candau va prendre ma place à la chambre d'hôte et je craignais qu'il ne se fût retrouvé seul mais non, Axel, les italiens et Jules, ainsi que Wim semblent rester. A mon programme du jour, j'avais mis le Fafleralp avant de partir vers l'Autriche mais Axel m'a expliqué le temps qu'il faut pour, après Sierre et l'autoroute, sur les nationales et à travers villes et montagnes, rejoindre le centre de la Suisse et Andermatt.

Dès lors, changement de programme, je repars d'où je suis venu par l'autoroute, vignette aidant : Montreux, Bern, Zürich. Aux environs de midi, la route n'ayant pas présenté de bouchons, je retrouve aux abords du lac de Zürich à Pfäffikon. Wim m'avait prévenu : Etzel, c'est court mais pentu. De fait, en arrivant par l'autoroute, juste avant la sortie, la route passe au-dessous et à côté de la pente (comme pour la Redoute en Belgique) et la vision me prévient de la même façon.

Après deux jours en si agréable compagnie, se retrouver seul n'est pas simple même si ça permet de s'établir son propre planning pour les arrêts "bouffe". Un petit coup de fil à la famille ne me donne pas un grand moral : je sais que je vais m'éloigner à l'est à près de 2000km de chez moi en deux jours et les miens me reprochent de partir aussi longtemps. En même temps, je les comprends et en même temps, je me dis que seul, loin de chez soi, on a plus besoin de soutien que de reproches, mais bon... chacun a ses difficultés chaque jour !

Garé sur un parking d'hôpital en bordure du lac, je m'élance pour Etzel. On quitte d'abord le village, pour passer sur l'autoroute et rentrer dans le vif du sujet : un joli 15%. Un kilomètre plus loin, virage à gauche, route à circulation réglementée, le revêtement change un peu, on rentre en sous-bois mais la pente ne s'affaiblit pas et le 10% est largement dépassé la grande majeure partie du temps. On sort du bois pour un final romantique. Pas plus de 7km au total nous amènent à un col charmant, avec un sentier (bitumé?) qui s'élève encore à droite, une chapelle à gauche, et une descente en face qui a l'air tout autant en déclivité. De nombreux promeneurs y profitent d'un samedi estival. Etzel reste un col dur, mais sa briéveté et l'entraînement des jours passé m'a permis de le passer à l'aise en 32x26. J'en suis à "+7" depuis le début du voyage.

Le charme romantique des derniers hectomètres du pentu Etzel Pass.

Je reprends l'autoroute vers l'est et je revois une heure plus tard un endroit qui m'a toujours tenu à coeur : la principauté du Liechtenstein. Ce grand versant de montagne, vert et riche, propre et légendaire, qui forme un pays à lui tout seul m'a toujours fasciné. je repense à Steg, son tunnel, à Malbun et le Saraiserjoch tout là-haut ! Souvenirs, souvenirs. En même temps, un SMS d'excuses et d'encouragement de Belgique me redonne un meilleur moral.

Je remonte au nord jusqu'à Alstätten, pied de mon 2e et dernier du jour que j'avais expressément choisi plus facile : le Stoss. Comme je savais la difficulté courte et régulière sans pente énorme, je prends même le temps de reconnaître la montée en voiture et stationne celle-ci au sommet à côté de la gare du funiculaire ou train à pente. J'ai mesuré : cela fait 6km600 depuis le centre d'Alstätten. Je resors le vélo pour la Xième fois, je descends à tombeau ouvert sur une route à motos. Et hop, demi-tour ! Aujourd'hui sur 6km600 à pente honnête, je ne risque pas de me brûler. Alors, à fond, dans le rouge, en danseuse, en half-training : 30' plus tard, je suis en haut et j'ai pris la peuine de retenir dans ma tête les altitudes à chaque kilomètre que je note de suite dans mon carnet en arrivant : 465m - 540m - 617m - 682m - 763m - 831m - 900m - 948m. Donc, entre 6 et 8% tout le temps, avec un bitume de rêve, des villas fleuries, un hôtel dans un grand virage, quelques épingles à cheveux, des troncs de bois tronçonnés récemment... Un régal même si c'est loin d'être le plus beau BIG suisse. Un BIG original en quelque sorte ! Au sommet, un autochtone qui attend le train pour aller faire du shopping en...bas, m'interpelle sur ce que je suis venu faire. "Belgien", ah "plein de champions cyclistes". Merci le Suisse !

Le sommet du Stoss avec la ligne de chemin de fer qui plonge sur Alstätten.

On redémarre pour un long tronçon d'automobile jusqu'au Tyrol. Je cherche à dépenser mes derniers sous suisses en essence et nourriture et je passe la frontière. la douanier m'explique qu'il va me falloir trouver une vignette dans la première station à essence autrichienne. Ayant faim, je me réjouis à l'avance d'y prendre mon dîner du soir. Mais, ce qui devait arriver, arriva : Bouchon d'une heure ! Dans un long voyage, ça a aquelque chose d'hyper énervant, surtout quand un énorme camion vous bouche la vue et vous empêche de voir la raison de l'embouteillage. Une heure plus tard, des gyrofars, des voitures de police et deux voitures sur le toit suffisent à tout expliquer.

Il est tard, alors je fonce dans les tunnels de l'Arlberg, et d'Innsbrück avec la musique de "Muse" à fond dans les hauts-parleurs de la voiture. Ca me permet d'oublier que j'ai faim. Après Innsbrück, je suis tranquilisé, j'ai rattrapé mon retard : je peux m'arrêter. La formule "snack-restoroute" autrichienne offre des spaghettis bolognaises en quantité industrielle pour un prix dérisoire. Finis les prix exorbitants helvétiques. Je m'engouffre le plat de pâtes avec délectation.

Il est 20h30 quand j'arrive à Sint-Johann en Tyrol. Mais pas de trace de mon hôtel. Je reperds du temps et j'ai peur que ma chambre ne soit remise en location. Je cherche l'office du Tourisme. J'y prends un plan. Je cherche la rue où je suis, la rue de l'hôtel. Pas simple. Dix fois, après un carrefour, je reconsulte le plan. Ce n'est pas au centre, c'est vers les stations. ais là, c'est le bonheur, le calme.

Hélas, l'hôtel est fermé, il est près de 22h. Mais soudain, je n'en crois pas mes yeux. Accroché à la clenche de la porte, une lettre avec "Herr Gobert". A l'intérieur, la clef de la chambre et de l'hôtel. J'emménage dans un hôtel 4 étoiles où j'ai l'impression d'être seul. TV avec 50 chaînes, douche et salle de bain de luxe, le pied ! Un coup de téléphone regénérateur à ma chère et tendre, des JO plein les yeux, un torrent qui coule sous mon balcon et des 2000 mètres à perte de vue : paradisiaque ! Je suis venu pour ça, je l'ai et je suis bêtement heureux !